La nostalgie du soleil

La douceur de ce matin qui dépose les fines gouttelettes de rosée, cela m’évoque ce temps révolu ou l’on chargeait les valises dans le coffre de la Peugeot 404, et zou, via l’Espagne!
Un retour au pays de nos parents pour un bain de jouvence. Les vacances dans le vrai sens du terme, où l’on baignait encore dans ce solidaire et indéfectible esprit de famille. Les coups durs du destin étaient vécus avec une grandeur d’esprit, au vu que l’union de la fratrie pouvait terrasser tous les soucis et maux de la vie quotidienne.

Au-delà d’une douce insouciance, le père de famille représentait ce pilier légendaire à l’image marquante qui détermine les fondamentaux d’une histoire, comme par exemple les temples grecs ou romains érigés pour déterminer la grandeur et la splendeur, à percevoir une image qui démontre le respect que l’on pouvait avoir pour cet être unique, qui par sa conception de nous enseigner les rudiments d’une existence, revêtait à nos yeux cet exemple à suivre, et par son insistance à nous faire comprendre le devoir moral suite à une parole donnée.
Le fait aussi de garder coûte que coûte son identité; qui à elle seule peut devenir la mosaïque des souvenirs et des émotions. Il insistait aussi en nous répliquant qu’il ne fallait pas se sentir le cul entre deux chaises, que ce soit en France ou de l’autre versant des Pyrénées, et de suivre toujours son rang dans la dignité et le respect .

Revenons un court instant sur la Peugeot 404 et ses problèmes de chauffe. A l’époque le radiateur bouillait régulièrement d’une eau boueuse limon, et la causalité était que l’aiguille d’eau de la température s’affolait! A maintes reprises nous nous arrêtions au bord des petites routes nationales, pour remettre de l’eau en prélevant délicatement le bouchon qui pouvait sauter à tout moment comme une cocotte minute, pour ensuite laisser refroidir le moteur.

Mais qu’importe, l’on bravait les basses températures emmitouflés que nous étions à l’arrière avec une couverture de laine qui réchauffait nos corps d’oisillons. Nous étions un pour tous, et tous pour un,  pour imaginer la scène et partir vers des lointaines contrées, comme les enfants péruviens aux sourires angéliques dans cette zone géographique du  Machu Picchu, ou l’énergie de nos corps unis qui reposaient sur notre entraide au beau milieu de ces champs de patates, qui pouvaient se confondre avec les vestiges de la ville fortifiée.

Que dire des pneus à crampons équipés spécialement pour l’occasion, et ainsi mieux chasser la neige pour gravir avec bravoure les montagnes du Pays Basque, et plus tard celles de Castille.

Pour cette Peugeot 404, qui était pour nous tous admirable par sa vaillance, elle avait aussi  une force de caractère à toute épreuve, avec toutes les similitudes de notre père, et cela nous donnait allègrement cette impression d’être à bord d’une rutilante voiture sportive d’un célèbre constructeur italien. Comme par miracle les voies impénétrables du saint esprit nous accordaient leurs faveurs, pour que nous puissions mieux exaucer nos vœux!

Après une dizaine d’heures éreintantes de route, il ne nous restait plus qu’une trentaine de kilomètres à parcourir pour atteindre les premiers villages, mais quelles angoisses que mes jambes en tremblent encore aujourd’hui, sur ces lacets qui se rétrécissaient à vue d’œil. Le père oubliait son extrême fatigue, et il descendait de sa Peugeot 404 pour se munir d’une pelle escamotable camouflée dans une minuscule boîte, il dégageait la chaussée vêtue d’un épais manteau blanc de neige,et comme à l’accoutumée avec son immense courage, pour se fixer un défi supplémentaire, il crachait dans ses mains pour mieux se réchauffer. Si l’on osait plonger un regard de biais l’on pouvait apercevoir tous les dangers représentés par les ravins en contre bas!

Une fois de plus, rien ne pouvait arrêter le courage et la force de caractère du petit espagnol, comme il répétait de tant à autre aux automobilistes garés sur une aire de repos. Cela ne le dérangeait nullement de prendre le volant après une journée de travail bien remplie, eh hop nous étions tous partants pour une nouvelle aventure à sillonner les routes. Pour chaque voiture dépassée, elle était imagée par un sandwich de plus avalé dans le compteur kilométrique. La Peugeot 404 endurait avec allégresse les bornes à engloutir!

Sans laisser transparaître aucune idolâtrie envers ce père respecté et respectueux, il faut reconnaître néanmoins qu’il roulait en appliquant le code de la route, et en sa faveur c’est qu’en plus de vingt ans de conduite, il n’avait commis aucun accident. Vous allez me rétorquer qu’à l’heure actuelle le parc automobile s’est multiplié à une allure démentielle, avec les primes à la casse, etc…

Mais n’étions nous pas heureux avec si peu de choses? Et dire que l’essentiel à petites doses remplissaient de concert nos âmes. Une éducation aussi stricte soit elle laisse augurer un amour des parents qui tentent de transmettre un savoir, alors qu’importe que des parents soient maladroits dans leur façon d’éduquer un enfant, le plus important est d’inculquer les règles à tenir avec sérieux et respect, et de cette manière là se forger sa propre éducation avec les bases fondamentales pour affirmer une personnalité en devenir.

Sommes nous pour autant traumatisés d’avoir subi des corrections méritées par notre insolence? Que je saches je n’ai pas à l’heure actuelle des séquelles invalidantes, tout comme mes frères, qui permettent d’interpréter certains actes pardonnables entraînant un état post- traumatique, car il me semble que dans la société que nous vivons à l’heure actuelle, il est très facile quand ont a les dons requis à cet exercice, de se faire passer pour le pauvre malheureux, et de cette manière pouvoir rejeter à outrance la faute aux autres, sans pour autant ne vouloir jamais se remettre en question!
Avant tout, il faut arrêter de se raconter des histoires, et avoir l’honnêteté de devenir adulte pour faire enfin face aux futures responsabilités.

Mais encore une fois recentrons nous, pour pouvoir aborder cette impétueuse envie qui nous animaient à vouloir se mélanger aux villageois, et partager avec eux la transmission d’une simplicité de vie, dont nous pouvions jouir avec ravissement. Nos mémoires au fil du temps ne peuvent pas oublier les instants magiques et privilégiés, pour mieux se plonger avec avidité dans les récits de nos grands-mères, où assises au seuil de leurs maisons blanches entretenues avec soin, sur des petites chaises en rotin. Elles nous évoquaient cette guerre sale orchestrée par les rouges, ses fascistes de malheur répétaient- elles, les souffrances endurées, les familles en errance dans la peur et la misère. Toutes ces barbaries obscures subies, où le chaudron du diable aurait dû condamner de telles atrocités, et mettre une bonne fois pour toute au pilori toute la sainte église et ses pontifiés, car comment expliquer qu’elle se soit montrée si lâche, si effacée, ne serait qu’un petit geste pour venir en aide aux âmes en peine.
Une pure hypocrisie des religieux à s’engraisser d’une façon éhontée la panse dans les cloîtres douillets en abusant des malheurs de leurs frères, pour ensuite accourir comme les sauveurs, comparable à la cavalerie soucieuse de gloire et de prestige une fois la bataille terminée!

Des pensées uniques, et qui pourtant nous assènent une certaine envie de retrouver d’anciennes sensations et bribes du passé, comment n’en serait-il pas ainsi, quand on perd des proches, à travers leur vécu une tendre et affectueuse nostalgie fait reverdir nos cœurs, tout comme cette nature qui depuis la nuit des temps, nous observe pour offrir sa diversité colorée prête à s’exprimer et à réveiller nos sens contemplatifs.

Voici la plus belle leçon de vie que l’on peut nous inculquer, pour pouvoir observer toutes les richesses que nous n’osons pas découvrir par la faute à vouloir exister à travers un paraître, et l’on donne cette fausse impression d’être toujours accaparé à diverses tâches. Il suffit de fermer les yeux, de respirer calmement, et ensuite de compter jusqu’à trois pour déjà apercevoir la merveilleuse aventure individuelle et humaine qu’il nous reste encore à explorer…

3 Comments

  1. marie

    Très beau. Tout au long de la lecture on voit les images de ce récit. C’est la nostalgie qui apparaît par moment, le respect et le bonheur simple.

  2. Avatar photo
    kike

    Merci Marie pour tes encouragements, cela fait chaud au coeur la parcimonie de tes mots, afin de continuer des recits d’un instant fugace, mais si délicat pour nous souvenir d’un bonheur intemporel et bienheureux.

  3. Sandrine B

    Du vécu, moi, je me souviens de la 504 avec laquelle on partait en vacance en espagne dans les années 90 avec ma cousine et ses parents. Le bonheur, l’insouciance, l’exitation, la vie, tout simplement être soi-même ! la nostalgie me suit et ne me quitte pas, je regrette ce passé de mon enfance heureuse.

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